Cela fait plusieurs années que PSA s’en sort très bien. Chaque année depuis peu, les ventes sont au beau fixe, les marges sont conséquentes et PSA peut se permettre de plus gros objectifs. Pourtant, ça n’a pas toujours été comme ça. A l’heure où Renault est en difficulté et tente d’en sortir, il faut se rappeler qu’en 2012, la situation a été la même pour Peugeot.
Pire encore, car la crise que le groupe avait connu à l’époque était telle que certains pensaient que PSA allait couler. C’est pour dire à quel point ils partent de très loin. Dans cet article, on va revenir sur cette période noire pour PSA, et la stratégie appliquée pour permettre au groupe de perdurer, d’une part, mais surtout de revenir dans un bilan stable et bénéficiaire.
A l’époque, il faut rappeler que le groupe PSA n’était composé que de deux entités : Peugeot et Citroën. De plus, il n’y avait pas réellement de stratégie d’internationalisation au sein du constructeur. Ils se sont – pour ainsi dire – contentés du marché européen en majorité. Et encore, 60% des ventes se faisaient en France en 2011. Autant te dire que le groupe était fortement dépendant du marché français.
Les prémices de la chute
Qui plus est, Peugeot avait également souhaité développer une stratégie de montée en gamme du groupe. L’idée était toute vue : Une montée en gamme permettrait de proposer des prix plus élevés, et ainsi se dégager plus de marges. On comprend mieux l’origine du lancement de la Citroën DS3. Il s’agissait d’une version plus haut de gamme que la citadine dont elle est dérivée, avec un design plus tendance (et qui, à l’heure actuelle, est toujours au goût du jour, puisque notamment repris pour la DS3 Crossback) et des moteurs plus puissants. En ce sens, la DS4 et la DS5 ont été lancés… Avec un accueil du public que l’on connait aujourd’hui.
D’autre part, la Peugeot 508 première du nom sorti en 2011 était dans cette optique de montée des prix. Les ventes en ont pâti, parce que même si la voiture était de très bonne facture, les clients habituelles de Peugeot ne voulaient pas mettre autant dans une berline familiale. La Peugeot 407 coûtait facilement 6000€ de moins. Mais elle n’avait pas les ambitions du haut de gamme. Une telle image prend du temps à se construire auprès du public, et ce dernier se dirigeait vers le trio allemand quand ils voulaient de telles prestations.
Quoi qu’il en soit, Peugeot avait des ambitions qui ne collaient pas à la réalité du terrain. Le groupe n’a pas assez visé le marché international, et surtout, ils perdent de l’argent. Et ce second point sera les prémices de la crise que connaîtra PSA.
Le début de la fin ?
Pour ainsi dire, le groupe a beaucoup souffert en partie à cause de la conjoncture de l’époque. Tout d’abord, la crise que le Japon connaissait en 2011 a entrainé la montée des prix des matières premières. Ensuite, la crise de la dette en Espagne et en Italie n’a pas permis au groupe d’immatriculer plus de véhicules en Europe. Cette conjoncture leur a fait perdre 13,9% des ventes de véhicules dans ces pays latins. Enfin, la prime à la casse fut bénéfique au départ pour le groupe. Mais le durcissement des conditions a également provoqué une chute des ventes à même en France.
Autre raison, les usines ne produisaient pas autant qu’ils devaient. Normalement, une usine rentable produit 75% ou plus des volumes. Or, chez PSA, trois usines consacrées à la production de petites voitures tournaient entre 60 à 68% de capacité : Madrid, Poissy et Aulnay Sous-Bois.
Des erreurs de stratégie sont également présentes. Par exemple, PSA était présent en Chine depuis les années 80, mais ils n’avaient à ce jour que 3,4% du marché. Ils n’étaient pas réellement présents du fait que leur gamme ne répondait pas vraiment aux attentes des chinois.
Une production majoritairement française
Enfin, PSA produisait encore majoritairement en France. 44% des immatriculations étaient produites en France, contre 23% pour Renault. Une 207 produite en France coûtait 700€ de plus que si elle était produite en Slovaquie. La nouvelle 208 produite au Maroc et en Slovaquie n’est pas étonnant. Actuellement, une citadine n’est pas rentable pour un groupe automobile si elle est produite qu’en France.
Toujours sur le volet de la production, PSA n’avait pas de politique de coût efficace. Par exemple, ils n’avaient pas de politique de fabrication par modules, comme le faisait le groupe VAG. Le but d’une telle politique était de redévelopper que 20% des pièces pour la sortie d’un nouveau modèle. PSA, eux, partaient à moitié sur une feuille blanche en redéveloppant 50% des pièces. C’est ce qu’ils ont fait quand la première 208 était sortie en 2012, ce qui revient trop cher.
Plus de 5 milliards de pertes en 2012
Le manque de stratégie en matière des coûts, suivi d’une conjoncture défavorable dans certaines régions du monde (et en France puisque la crise de 2008 a eu des conséquences même bien après) a entrainé de lourdes pertes pour PSA. En clair, les ventes ne couvraient pas les dépenses que PSA avait. Et lorsqu’un groupe doit essuyer d’aussi lourdes pertes, des décisions fatales doivent être prises.
Ainsi, plus de 11 000 postes seront supprimés d’ici 2014. Année où chez Peugeot, on pense pouvoir atteindre l’équilibre. Ceci inclut la fermeture de l’usine d’Aulnay Sous-Bois – connu pour y avoir hébergé l’assemblement de la Peugeot 106 notamment – qui contenait 3000 salariés.
Ce chiffre de 5 milliards inclut en grande partie des dépréciations d’actifs massives, ainsi qu’une lourde perte opérationnelle qui leur a coûté 576 millions d’euros. Le chiffre d’affaires a, quant à lui, reculé de 5,2% pour atteindre 55,4 milliards d’euros. A cette période, le groupe perdait 200 millions par mois dans la branche automobile. Beaucoup parlaient de la nationalisation de PSA, le groupe connaissant des difficultés. Néanmoins, Pierre Moscovici l’avait bien rappelé : Ce n’était pas à l’ordre du jour.
Comment Peugeot est sorti la tête de l’eau
Tout ça, c’est bien mauvais, mais Peugeot ne peut pas rester sans rien faire. Déjà, ils comptent retrouver l’équilibre d’ici 2014. Ils s’attendent donc à faire une année 2013 sans éclats, mais tout en réduisant les pertes. Nous allons voir au sein de cet article que la gamme actuelle de Peugeot émane des conséquences du plan de la sortie de cette crise de 2012.
La sortie de la crise s’est opérée avec des réductions de coûts drastiques. Et cela a affecté en partie la gamme du lion, ainsi que celle de ses sœurs. En résumé, il n’y avait que Peugeot qui voyait sa gamme être développé. Citroën, quant à lui, avait été mise en pause. Il y avait bien la Citroën C4 Cactus lancé en 2014, ainsi que la nouvelle C3 sortie en 2015, mais toute la gamme fut figée en France pendant des années.
La Citroën C4 a perduré jusqu’en 2017, comme la Citroën C5 jusqu’en 2018. Ces deux modèles n’ont pas été remplacés. Citroën a surtout développé des modèles pour le marché chinois et les marchés émergeants. Elle a pris une direction low-cost. Une Citroën C6 fut lancée en Chine, ainsi qu’une Citroën C5 Aircross. Dans les pays émergeants, la Citroën C-Elysée fut lancée. Elle partage la même conception que la Peugeot 301, lancée en ce sens également. Cette solution était effectivement une piste de la sortie de crise pour PSA.
Le haut de gamme sera assumé par DS, le low-cost par Citroën
En effet, les clients qui n’avaient pas les moyens ne souhaitaient pas dépenser beaucoup d’argent dans une marque qui souhaite monter en gamme et, ainsi, augmenter les bénéfices (donc les prix de vente des modèles). Le modèle low-cost a donc été opéré pour Citroën. Par la suite, les « nouveaux » modèles de Citroën ont été majoritairement des imports d’autres pays ou des recarrossage d’autres modèles (Citroën C3 Aircross). On a, là, une conception de groupe. Cette fois, PSA a mis en place une politique de fabrication par modules.
Concernant Peugeot, la sortie de crise a été opéré différemment. Le constructeur s’en est sorti grâce au marché des SUV. Cela a commencé avec le Peugeot 2008, lancé en 2013 et qui a connu un certain succès. Par la suite, Peugeot a appliqué une politique de réduction des coûts puisqu’ils ont réalisé un partenariat avec Mitsubitshi, d’une part (pour les SUV Peugeot 4008, le Citroën C4 Aircross, ainsi que les citadines électriques Peugeot iOn et Citroën C-Zero) et Toyota d’autre part (qui a été reconduit pour la Peugeot 108 et la Citroën C1 II).
En clair
Surtout, Peugeot a frappé fort avec le 3008 II dont un article sur le succès de ce SUV sera prochainement dédié. La montée en gamme a finalement opéré, mais Peugeot se trouve dans le segment de l’access premium (comme Volkswagen, même si pour moi je considère ce dernier comme un simple généraliste).
Enfin, le troisième volet fut DS. J’ai beaucoup parlé de cette marque et de son indépendance dans cet article, donc tu peux aller le lire pour voir ce qu’il en est. Enfin, Peugeot a racheté Opel en 2017, et la suite, on la connait.
Au final, PSA quitte la situation de crise sur le long terme. La leçon a été bien retenu. Malgré la crise économique de 2020 (crise qui a été un peu encouragé si je peux me permettre), elle n’a pas connu un remoud aussi puissant que… Chez Renault.